Petites et grandes surfaces de bricolage : quels sont les enjeux organisationnels pour réenchanter l’expérience client en magasin ?

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L’expérience client constitue aujourd’hui un cheval de bataille pour les petites et grandes surfaces de bricolage. A t-elle été traitée « par-dessus la jambe » pendant de nombreuses années ? Probablement oui, jusqu’à ce que le e-commerce, avec son leader ManoMano, ne bouscule l’inertie établie, et réponde avec un succès inattendu aux besoins et aux désirs des bricoleurs, dans leur définition la plus large.

 

Et malgré le ralentissement du marché, la baisse du chiffre d’affaire due à la pression tarifaire entre les enseignes traditionnelles, la valse des acquisitions et cessions de points de ventes, les distributeurs du secteur n’ont d’autre choix que se préoccuper de considérations qualitatives, afin de (re)séduire les consommateurs. Et pour ce faire, le magasin de bricolage doit évoluer vers un lieu de vie centré sur « l’expérience consommateur qui se soldera par un acte d’achat » … ce qui n’est encore le cas le cas aujourd’hui qu’à 50% en GSB.

 

Evidemment, un tel mouvement ne va pas sans une réorganisation de fond accompagnée de ses enjeux nouveaux et variés, selon le format, le concept, la nature de la clientèle et ses habitudes de consommation : quels sont-ils et comment parvenir à y répondre, afin de ré-enchanter l’expérience client ? Notre point de vue sur le sujet …

 

Le marché du bricolage : dominé par les GSB, challengé par les négociants, et menacé par les pure-players

 

Avant de parler d’enjeux organisationnels, arrêtons-nous quelques instants sur la configuration de ce secteur. Le marché de la distribution d’articles de bricolage est très éclaté, avec de nombreux acteurs qui présentent des formats et des surfaces très différents selon les segments, mais aussi à l’intérieur de chaque segment. Par exemple, concernant la GSB qui détient plus de 50% de la part de marché à travers deux grands groupes – Adeo et Kingfisher – présentent des très grandes surfaces de vente, comme Leroy Merlin (Adeo) ou Castorama (Kingfisher), mais également de plus petits formats comme Weldom (Adeo). On trouve également des surfaces de taille moyenne qui fonctionnent de manière indépendante à l’instar de Monsieur Bricolage, ou en groupement, à l’image des Mousquetaires (Bricomarché, Brico Cash, Bricorama).

 

Alors que les détaillants indépendants et la GSA ne représentent que 5% du secteur (en PDM), les négociants en matériaux de construction, tels Gedex, Point P ou Big Mat, ciblant initialement les professionnels, ont trouvé un relais de croissance auprès des particuliers, et s’intègrent désormais dans le paysage B2C avec 15% de part de marché. Si leurs surfaces de vente ne sont pas énormes, leur espace de stockage est plus important, ce qui peut évidemment modifier la problématique organisationnelle.

 

Quant au poids du e-commerce, il n’est pas encore très développé en termes de part de marché, mais il progresse de manière fulgurante. En effet, si les pure players ne représentent encore que 3% de part de marché, ce canal de vente est celui qui a le plus progressé ces dernières années, avec notamment un bond de +25% d’articles vendus entre 2017 et 2018. La percée des marketplaces avec en tête « le modèle disrupteur » de ManoMano (volume d’affaires de 425 millions d’euros en 2018, soit une progression de 80%, et 3 millions de références) a de quoi faire réagir l’ensemble des points de vente physique. En effet  la place de marché a su se positionner avec habileté sur ce qui faisait défaut aux enseignes physiques : la réponse aux besoins et usages des consommateurs actuels, tels que le conseil de spécialistes au moment opportun, des tutoriels pour combler une méconnaissance des travaux à effectuer, une approche communautaire et collaborative, ou encore un panel de services très aboutis notamment dans la logistique. Certaines enseignes s’associent d’ailleurs avec des marketplaces généralistes, à l’instar de Mr Bricolage qui, contre l’ouverture de corners CDiscount dans certains de ses points de vente, voit désormais son offre distribuée sur la place de marché … une manière de combler le retard avéré de la distribution en ligne d’articles de bricolage et jardinerie pour les enseignes traditionnelles.

 

C’est en tirant parti de ces initiatives en ligne que la GSB se réinvente progressivement, pour garantir une expérience client différenciante, moderne et engageante. Tout l’enjeu réside dans le fait de savoir adapter l’accueil, l’offre et les services à des besoins spécifiques, liés à la situation géographique, au segment ciblé et à son comportement d’achat, au type de projet, à la saison ….

 

Quelles en sont les principaux déterminants et comment y répondre en termes d’organisation ?

 

Taille des formats, nature des concept, typologie clientèle et localisation : leurs répercutions sur l’organisation des points de vente en GSB

 

Quels défis pour les superstructures de périphérie ?

 

Leroy Merlin et Castorama, qui se partagent plus de la moitié du marché de la GSB, malgré les difficultés rencontrées par le groupe Kingfisher, présentent une surface moyenne de vente supérieure à 11000 m2. Une caractéristique qui implique une largeur d’offre – plusieurs dizaines de milliers de références – et une profondeur de gammes importantes, ce qui exige une spécialisation approfondie des conseillers à la vente sur un secteur ou un rayon. D’autant que la nature même de ce type de magasin implique que des projets de grande envergure, du type construction ou rénovation, puissent être pris en compte sur des univers aussi variés que la cuisine, le jardinage ou la décoration.

 

A ce titre, Leroy Merlin renouvelle sa manière de considérer l’habitat en dépassant le rôle du simple vendeur pour se tourner vers un modèle d’accompagnateur de projet – 10% du chiffre d’affaires de l’enseigne est réalisé sur les cuisines intégrées. Ses points de vente se situant en périphérie des villes, l’enseigne développe une stratégie lui permettant de jalonner l’expérience client de nombreux effets « waouh ». Ainsi, des espaces détente et services, au sein desquels sont ouverts des lieux de vies sont mis en place : ateliers thématiques, mises en scène et tests in situ, cours de  bricolage de base aux plus grandes tendances DIY, utilisation d’outils sur place ou location de matériel, salles de réunion pour les associations locales… Une animation qui permet d’améliorer l’image du magasin et favorise la préférence à l’enseigne, comme en témoigne l’Espace Campus installé dans le point de vente de Brest.

 

La contrainte organisationnelle principale est qu’il est difficile de demander aux collaborateurs d’être des champions et de la plomberie, et du jardinage, et de la peinture … Il est donc plus pertinent de miser sur des collaborateurs qui se spécialisent pour acquérir une bonne compréhension de leur univers. L’enjeu organisationnel de ces très grandes surfaces consiste donc à être en mesure de bien prévoir l’activité à l’intérieur de chaque univers -c’est-à-dire les flux clients- pour y affecter les bonnes personnes au bon moment, en fonction des types de projets à accompagner (qui demandent un temps de conseil important) et des produits permanents ou saisonniers nécessitant du conseil  à la vente (cela dépendra de la famille de produit). Une fois que cette priorité est mise en place, comment occupe-t-on les collaborateurs sur le temps restant ?

Tenue du rayon pour magnifier l’univers, ouverture à la polyvalence sur des activités communes au magasin comme la mise en rayon ou la caisse ? Pourquoi ne pas envisager aussi des espaces de vies dédiés aux gros projets, où les clients seraient reçus suite à une prise de rendez-vous, par des collaborateurs formés à l’accompagnement personnel ?

 

 

Moyennes et petites surfaces : une offre géolocalisée et un fort maillage

 

Les enseignes comme Weldom, Brico dépôt, Bricomarché, Bricorama, Mr Bricolage,  disposent de surfaces moyennes de vente allant de 2000 à 6600 m2, et répondent à des besoins de bricolage souvent plus simples mais facilement accessibles. Les projets sont généralement moins ambitieux mais l’offre ainsi que le conseil se doivent de rester riches. Les collaborateurs de ce type de surface, maîtrisent une offre plus large qui demande plus de polyvalence, mais également tous les produits de « première nécessité » pour les bricoleurs. Certains vendeurs, selon leur expérience, sont capables d’accompagner les clients sur de plus gros projets : il est donc important d’en tirer parti et de le prendre en compte dans l’organisation du travail.

 

Mais de manière générale, dans ce type de concept, le client ne s’attarde pas : il souhaite trouver rapidement son outillage, voire bénéficier de quelques conseils, l’accompagnement se résumant plutôt à l’orientation du chaland dans le magasin.  D’ailleurs, pour simplifier l’amélioration de la maison, Kingfisher devrait lancer début 2020, dans ses enseignes Castorama et Brico Dépôt, « Good Home », approche hybride entre gamme de produits, slogan-signature d’enseignes, et concept de magasins… du service rapide en somme !

 

La notion de proximité et la relation client sont néanmoins très importantes pour ce type de surface, implantée dans les moyennes et les plus petites villes … ce qui impose également  une diversification de l’offre, afin de répondre à un large panel de besoins. Par exemple les enseignes Magasin Vert et Point Vert, multi-spécialistes de proximité du groupe Triskalia, proposent à travers un dense réseau de magasins en Bretagne, des gammes de jardinage, animalerie, bricolage, vêtements de loisirs, et pour certains, des produits alimentaires du terroir ainsi qu’une sélection de vins. La qualité d’accueil, de conseil, de service, et l’intégration de valeurs telles que l’écologie dans le fonctionnement du magasin (recyclage des emballages, récupération des eaux de pluie, lumière naturelle mieux utilisée) imposent une organisation adéquate … et du temps à allouer pour bien réaliser les tâches qui y sont liées.

 

Avec respectivement 476 et 308 points de vente, Bricomarché et Mr Bricolage possèdent le plus gros maillage des GSB en France, et adaptent leur offre aux spécificités géographiques de manière très précise – couleurs ou matériaux locaux, végétaux les mieux adaptés au climat régional, offre saisonnière plus longue selon le lieu d’implantation … Une « coquetterie » à forte valeur ajoutée qui mobilise des connaissances, des compétences voire des qualifications de la part de l’ensemble des collaborateurs du magasin. Ce type de point de vente demande moins de spécialistes et de personnes par linéaire, mais nécessite toutefois une connaissance produit plus large : ne pas être en mesure de renseigner une personne sur le meilleur pommeau de douche en fonction de ses attentes peut-être fatal en matière de fidélisation !

 

En conséquence, la problématique organisationnelle est donc multiple, à savoir :

  • maintenir cette compétence produit à tous les moments de la journée et toute la semaine
  • savoir gérer des activités de polyvalence plus importantes, comme être en mesure d’ouvrir une caisse dès que cela est nécessaire
  • recruter quelques perles capables de traiter de gros projets personnels.

Par ailleurs, s’il est important de gérer la prévision de produits vendus qui généreront du conseil à la vente, afin d’y allouer les ressources adéquates, il est également nécessaire d’occuper les équipes de manières optimale le reste du temps, question de contingence économique !

 

Surfaces de centre ville : des concepts urbains pour élargir sa clientèle

 

Les enseignes de bricolage multiplient leurs concepts urbains afin de toucher une nouvelle clientèle, moins évangélisée aux bonnes pratiques du bricolage, mais motivée !

Par exemple, Mr Bricolage a inauguré en 2018 à Orléans, un magasin de 860 m2 misant sur des solutions simples, clé en main, pour les clients présentant des projets nécessitant quelques heures à deux jours de travail. Le magasin teste des services de proximité tels que « La Déliverie », système de consignes automatiques dédiées au Click and Collect, afin de renforcer sa stratégie cross canal.

 

Autre exemple avec Leroy Merlin qui a ouvert en juin 2018 son 4ème magasin parisien : 5000 m2 en plein cœur de Paris, qui accueillent, outre 27000 références, des cours de peinture, des ateliers DIY, des espaces de découpe sur mesure, ainsi qu’une offre de location de matériel … en résumé, tout ce dont peuvent avoir besoin des bricoleurs du dimanche, pour réaliser leurs menus projets et se faire plaisir. Afin de présenter l’ensemble du catalogue et permettre aux clients de commander des produits non disponibles en magasin, ces magasins présentent des bornes interactives et la possibilité d’être livré entre 1h00 et 2h00 … le must de la proximité !

 

Kingfisher devrait également ouvrir son premier concept express (6000 références sur 500m2) à Lille à l’automne 2019.

Dans le cadre de la mise en place de ces nouveautés, l’enjeu consiste à pouvoir suivre les clients. Il faut prévoir et mesurer le temps, de manière à en faire des concepts les plus économiquement viables possible.

 

Les négociants ayant une activité en B2C :

 

Pour ces acteurs qui proposaient une offre dédiée au second œuvre, initialement destinée aux professionnels en bâtiment, construction, chauffage, sanitaires, jardinerie, etc … le marché du B2C représente un important levier de croissance. Les notions de décoration et de mise en scène y sont peu présentes, quoique certaines enseignes développent des showrooms, à l’image de Bigmat, qui a ouvert un atelier menuiserie en septembre 2018, et devrait déployer la location d’outils dans une vingtaine de ses points de vente cette année. Ils opèrent sur ce marché de deux manières différentes : soit par l’intermédiaire de GSB comme SAMSE (L’Entrepôt du bricolage) et Cofaq (une dizaine d’enseignes Brico Pro et Le Carré du bricolage), ou en ouvrant leur réseau au grand public comme Point P, Gedex ou Bigmat. Dans ce type de point de vente, les flux sont liés à la nature des clients (professionnels et particuliers) et donc à leur comportement d’achat, ainsi qu’à la géographie.

 

Les artisans par exemple, ayant leur journée de travail à effectuer, vont venir s’approvisionner tôt le matin, dans le magasin le plus proche. Il existe donc un enjeu de chiffre d’affaire récurrent, de business qui s’installe et donc une fidélité. L’activité étant locale, se créent l’habitude, la proximité humaine, la confiance et l’engagement sur du long terme pour autant que le point de vente soit en mesure de garantir la présence des produits en réserve dès le matin et que la profondeur de stock soit suffisante. Une exigence d’autant plus essentielle que les professionnels travaillent toujours plus ou moins avec les mêmes produits, qu’ils apprécient et dont ils maîtrisent l’utilisation, et sous des conditionnements plus gros qu’en B2C : il est par conséquent moins facile, si l’on tend vers la satisfaction client optimale, de proposer un produit de substitution. Cela implique une réserve plus importante car tout n’est pas forcément exposé, mais également une nécessité de bien connaître ses rotations de stock, prévoir un fond de roulement, et bien gérer les approvisionnements. Par ailleurs, le service doit être rapide afin d’écourter au maximum la notion d’attente, en particulier lorsque les artisans viennent se réapprovisionner : patienter longuement, même dans son magasin de prédilection, avant ou après une journée de travail n’est pas forcément très bien vécu.

 

Pour les particuliers, la présence des produits saisonniers ou destinés aux petits travaux de réparation par exemple, ainsi que celle des conseillers pour les guider dans leur pratique, doit être assurée en journée et le samedi. Point P par exemple, a modélisé une promesse de service, qui comprend un rendez-vous personnalisé pour exposer un projet à un expert, en mesure de conseiller sur le mode opératoire, le matériel, et même de mettre en relation avec un professionnel pour réaliser les travaux.

 

Dans tous les cas, la vocation de ce type de point de vente, née de l’expérience B2B, est de donner confiance, simplifier le processus d’achat et de commande, supprimer les points de douleur en servant de mieux en mieux … Elle implique donc un savoir être, une humanité et un savoir faire de mise en relation avec des professionnels, que ressentent et apprécient les clients B2C, tout en bénéficiant d’un service et d’un conseil adaptés à leur nature de « particuliers ». Cette notion de service est en effet très mature en B2B : elle a été lancée et formalisée en B2C par ManoMano et est progressivement reprise par d’autres, car elle devient incontournable.

 

Sur tous les circuits de distribution d’articles de bricolage, la propension à l’ultra personnalisation est très forte. La percée de ManoMano est liée certes, à une déficience des enseignes physiques, mais aussi à une demande de personnalisation du conseil, et une pression sur la qualité de la prestation. Les clients étant de plus en plus renseignés et experts, ils exigent un champion !

 

Les enjeux organisationnels des GSB destinés à ré-enchanter l’expérience client, sont donc principalement centrés sur la propension à bien servir celui-ci. Cette qualité de service passe par un accueil irréprochable, la capacité à bien accompagner les projets personnels, le recours aux services digitaux qui tendent eux aussi vers la personnalisation, comme la simulation 3D par exemple. Le vendeur devient un véritable consultant. Et afin de mettre en place ce niveau de qualité, il est impératif d’être en mesure de calculer une prévision de charge de travail, en fonction des tâches à effectuer, des livraisons de produits, des flux clients et des tous les autres critères susceptibles de la faire varier, pour toujours allouer le bon nombre de personnes à l’endroit où cela est nécessaire et au bon moment.

 

La plateforme de pilotage d’activité Timeskipper, vous aide à venir à bout de ces enjeux organisationnels. Sa technologie basée sur un moteur prédictif et une I.A, permet de mieux prévoir les heures de présence et de vente qui nécessitent du conseil, de bien modéliser l’activité pour allouer les bonnes personnes au bon moment et s’assurer qu’ils sont bien occupés le reste du temps. Sur les temps libres qui restent et qui sont identifiés, on peut affecter de la ressource à la polyvalence, comme le renfort en caisse ou en réserve, ou sur toute autre tâche commune. En utilisant quotidiennement la plateforme Timeskipper et en la mettant à jour avec des données en temps réel, les prévisions s’affinent, les imprévus sont mieux gérés, et la problématique organisationnelle du point de vente trouve des réponses toujours plus adaptées et précises, dans une démarche d’amélioration continue.